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Jean Tardieu : Une voix sans personne : Lettre d'ici
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Vous allez pouvoir accéder au commentaire composé du poème "Lettre d'ici" tiré du recueil "Une voix sans personne" de "Jean Tardieu".
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Ce fichier comprend un commentaire composé détaillé.
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PASSAGE : Voir poème ci-dessous.
Extrait du commentaire :
Dès l'abord, l'auteur de la « lettre » se définit, s'identifie par sa condition de mortel. « Je suis celui qui habite aujourd'hui parmi vous »; l'adverbe de temps « aujourd'hui » souligne en effet la précarité de l'existence humaine, rendue plus sensible encore par le verbe « commencer », employé au vers 20 : « je n'ai pas honte / de commencer dans les piétinements ». Mort en sursis, l'homme ne sait jusqu'à quel point le destin lui permettra de poursuivre sa marche, et sa difficulté d'être apparaît dans cette impression angoissante qu'il a parfois de ne pas avancer, de ne rien accomplir...
Poème étudié :
Je suis celui qui habite aujourd'hui parmi vous
l'un de vous. Mes souliers vont sur le goudron des villes tranquillement comme si j'ignorais
que le sol n'est qu'une feuille mince
entre deux étendues sans couleur et sans nom.
Moi cependant qui parle j'ai un nom
je suis celui qui est là parmi vous l'un de vous ma bouche parle mes yeux voient mes mains travaillent
innocent ! Comme si j'ignorais que ma peau n'est qu'une feuille mince entre moi et la mort.
Je suis celui qui ne regarde pas plus haut que les toits plus loin que l'horizon parallèle des rues.
Le soleil qui se casse aux carreaux avares
me cache le sommeil étoilé du monde
où je n'ai que faire, homme de ce côté-ci.
Mon espoir ah tout mon espoir est parmi vous près de vous près de moi je n'ai pas honte de commencer dans les piétinements
(j'ai rêvé d'un désert où j'étais seul
mais comme j'étais seul je ne pouvais me voir je n'existais donc plus le sable entrait en moi).
Ici je suis bien j'écoute on cause
dans la pièce à côté
et toujours cette voix même si elle change c'est toujours vous c'est toujours moi qui parle.
Que dire encore ? Nous vivons d'un verre d'eau tiré au robinet de la cuisine
et de la vie et de la mort continuelles
dans un monde éclatant immortel
givre du temps acier des anges
pluie et feux inhumains aux quatre coins du ciel.
Jean Tardieu, Une voix sans personne
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