Marcel Proust

Proust, Du côté de chez Swann, La Madeleine

Introduction

Il s’agit d’un extrait de l’œuvre « Du côté de chez Swann » de Marcel Proust. Il est tiré du premier livre de son œuvre « A la recherche du temps perdu » qui comprend sept volumes. Proust est un auteur mondain, dilettante et raffiné de la fin du 19ème et début du 20ème siècle, issu d’un milieu bourgeois. Dans cette extrait, il narre le surgissement d’un souvenir, provoqué par une sensation : l’odeur et le goût d’une madeleine. Il raconte le travail de la mémoire, les difficultés rencontrées; l’existence d’un moi sensible et d’un moi intellectuel, ainsi que l’émerveillement et le bonheur provoqués par cette sensation.

I. Le travail de la mémoire, les difficultés rencontrées

Pour Proust, le souvenir naît d’une sensation mais l’intervention de l’esprit est nécessaire pour le retrouver entièrement.

A. L’expression de l’incertitude

1. Le doute est exprimé par les termes : « grave incertitude », « ne devraient pas », « semblent », « d’où venait-elle? Que signifiait-elle? Où l’appréhender », « incertitude », « sans la notion de sa cause »;
termes de l’ignorance : « je ne sais », « ne la connais pas ».

2. L’hypothèse : « peut être », « ou ».

3. Les interrogations directes ou indirectes : « d’où venait-elle » (interrogation directe), « je ne sais pourquoi » (interrogation indirecte).

B. L’inutilité de la répétition

Elle ne permet pas de ressaisir le souvenir, qui reste imprécis.

C. Caractère fugace du souvenir et localisation difficile

Les antithèses:

1. La lumière

« éclaircissement », « faire entrer dans sa lumière », « claire conscience »;
qui est opposée à l’obscurité : « le pays obscure », « jamais de sa nuit ».

2. La profondeur

« tout au fond de moi », « redescendu »;
qui est opposée à la surface : « surface », « remontera », « soulever ».

Cette opposition correspond à deux mouvements opposés : une ascension, une descente. L’ascension correspond au surgissement du souvenir qui surgit de la conscience. La descente correspond à la descente de la mémoire qui retrouve en arrière la recherche dans le passé. Ce thème se retrouve d’ailleurs dans le titre général de l’œuvre de Proust : « A la recherche du temps perdu« . Il y a dans le mot « recherche » l’idée d’aller de l’avant ; mais aussi dans le mot « perdu » l’idée d’un mouvement régressif, de retour en arrière.
Ces deux séries d’antithèses se rejoignent dans les expressions : « la surface de ma claire conscience » et dans « remontera t-il jamais de sa nuit » : opposition de lieu et de thème (lumière/obscurité).

D. Le plaisir éprouvé par le narrateur et le moi du narrateur ne font qu’un

On passe du « je » sujet des verbes, notamment d’action, et qui désigne à la fois le souvenir et le plaisir qui lui est associé; au « elles » pour désigner l’essence de ce plaisir. Il y a identité entre le moi du narrateur et l’essence du plaisir qui naît le souvenir. Il nous explique cela par une métaphore annoncée : « Elle était moi » pour montrer qu’il y a fusion entre le souvenir dont il parle et lui-même.

II. Le moi sensible et le moi intellectuel

Le moi sensible est la partie de la personnalité qui approuve les sensations physiques; et le moi intellectuel est la conscience, l’esprit, l’âme, le cœur.

A. Le moi sensible

1. Le plaisir naît du goût, il est suggéré par deux techniques :

Lexique de la perception de la sensation et du jugement : « toucha », « tressailli », « extraordinaire », « plaisir délicieux », « envahit », « isolé »;
Allitération en [m] : « s’amollit », « morceau », « madeleine », « mot », « miette », « m », « mêlée ».

2. Le plaisir fait instantanément surgir le souvenir : car la sensation juste est plus puissante que tout le travail intellectuel que peut fournir l’esprit pour retrouver ce souvenir. Pour évoquer le surgissement du plaisir, Proust utilise le vocabulaire de l’esprit : « mes désirs de demain qui se laissent remâcher sans peine ». Le verbe remâcher est une métaphore habituelle de la nourriture utilisée pour la parole ou la pensée.

B. Le moi intellectuel

Pour Proust, c’est l’esprit qui doit retrouver la vérité, mais celui-ci a du mal à retrouver le passé et il se contente de reconnaître ce que lui dictent ses sens, en particulier l’odorat et le goût.

III. L’émerveillement et le bonheur du narrateur

A. Le lexique

1. Les champs lexicaux :

du plaisir : « plaisir », « délicieux », « joie », « je tressailli »;
de l’éternité : « isolé », « sans la notion de sa cause », « mortel », « puissante joie », « infiniment », « extraordinaire », « essence précieuse ».

2. Les intensifs : « extraordinaire », « délicieux », « précieuse » et « puissante ».

3. Emploi d’expressions de la soudaineté et de la rupture : « tout d’un coup », « à l’instant même », « aussitôt », « j’avais cessé de ».

B. Le lecteur s’investit fortement dans son texte

En effet, les marques de l’énonciation sont omniprésentes et en particulier les marques de la première personne. Les pronoms personnels : « je » (sujet), « moi » (objet) et aussi les adjectifs possessifs : « mes », « mon » : ces marques de la première personne et les temps du discours démontrent le fort investissement du locuteur dans son énoncé.

C. Les rythmes marquent l’enthousiasme

1. Des rythmes ternaires : « les vicissitudes de la vie indifférente, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire » (nom+adjectif), « médiocre, contingent, mortel ».

2. Emploi des procédés accumulatifs (ligne 54) : « Mais »; proposition subordonnée circonstancielle de temps; utilisation de deux compléments circonstanciels de temps (GN); accumulation d’adjectifs épithètes (accumulation épithètique); verbe; adverbe complément circonstanciel de temps; groupe nominal complément circonstanciel comparaison; accumulation de verbes à l’infinitif; deux compléments circonstanciels de lieux; complément d’objet direct en fin de phrase.
Au niveau des verbes, il y a un parallélisme syntaxique.
Le thème du texte, c’est-à-dire « l’édifice immense du souvenir », qui est une métaphore, est présenté comme un aboutissement dans la phrase car rejeté à sa fin, à son sommet; et est de même mis en valeur.

Ligne 60 : Même technique de l’accumulation des verbes et tournure comparative avec « comme … de même » : comparaison entre le décors de théâtre et le « papier japonais ». Proust allonge la phrase dans le but de mettre en valeur son idée : tout ce paysage du souvenir est seulement sorti de sa tasse de thé.

Conclusion

Proust souligne les difficultés que la mémoire a à retrouver le souvenir, difficulté d’autant plus grande que c’est l’esprit qui doit retrouver le souvenir alors que se sont les sens (le goût) qui le font ressurgir. Proust doit faire appel à la sensation imprévue, ce qu’il appelle « la mémoire involontaire », ici avec l’épisode célèbre de la madeleine, un épisode insignifiant à première vue mais qui en réalité est le point de départ de tout un monde de souvenirs.

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