Michel de Montaigne

Montaigne, Essais, Avant-propos

Introduction

C’est en 1580 que paraît la première édition des « Essais« . Le dessein de leur auteur en fait un livre sans précédent. Cette façon de parler de soi sans la moindre gène et sans ces vérités excessives à quelque chose de tellement nouveau. La sincérité de l’auteur est faîte d’une modestie subtile qui ne va pas sans quelque orgueil. Le texte que nous allons étudier est un avant-propos dans lequel nous sont présentées ses interventions. Nous nous intéresserons dans cet avant propos aux projets de Montaigne, faits de modestie mais aussi d’une part d’orgueil.

I. La modestie

Le ton est donné par un tutoiement qui rapproche le lecteur de l’auteur en le singularisant.

Ceci installe une familiarité complice.

L’écriture de cet avant-propos est simple dans le fond et dans la forme.

A. La forme

Pas de difficultés syntaxiques, phrases courtes, construction classique, pas de vocabulaire difficile (références latines par exemple).

Plutôt que de donner une définition brillante de la finalité de son œuvre, Montaigne s’efforce de repousser toute démarche vaniteuse, et par là même son lecteur : « je ne m’y suis opposé aucune fin« , « je n’y ai eu nulle considération de ton service, ni de ta gloire », « mes forces ne sont pas capables« .

B. Le fond

Le contenu est simple : utilisation des champs lexicaux de la transparence, de la simplicité et de la vérité : « bonne foi« , « façon simple« , « naturelle« , « connaissant« , « voir« .

L’idée de vérité soutenue par l’évocation du thème du bon sauvage n’est nullement polluée par les mœurs de la société.

La finalité en est que le livre semble tourner le dos au lecteur : il devient écrit intime, cahier intérieur à usage personnel et familial : « je l’ai voué à la commodité particulière et familiale de mes parents et mes amis« .

Derrière cette modestie se trouve une part d’orgueil qui est contenue dans toute démarche autobiographique.

II. L’orgueil

L’autobiographie est par définition un regard sur soi-même, une introspection, qui projette le « moi » au devant de la scène.

Par ailleurs, un grand nombre de phrases commencent par « je« . On compte de plus environ 30 occurrences de la première personne : « je n’y ai nulle« , « je l’ai voué« , « je veux« , « je suis moi-même« .

D’autre part, on peut se demander si l’humilité qui est réaffirmée de dissimule pas une part d’orgueil : « bonne foi« , « nulle considération de ma gloire« , « façon simple, naturelle« .

Le « moi » se théâtralise : « je suis moi-même la matière de mon livre« .

L’auteur s’abaisse : « sujet si frivole et si vain« . Est-ce une part d’artifice ? En tout cas, l’auteur joue avec le lecteur.

Alors même qu’il devrait présenter son livre (rôle du prologue), il tente de repousser le lecteur : « Adieu donc » et donne une anti-définition de ce qu’est son œuvre.

– disant surtout par un jeu de négations ce qu’elle n’est pas : « je ne m’y suis proposé aucune fin« , « je n’y ai eu aucune considération« , « ni … ni« .
– cela éveille ainsi la curiosité sur son œuvre.

Il justifie ainsi sa démarche autobiographique : quand il nous parle de lui, en fait il nous parle de nous aussi. Parler de soi, c’est parler des hommes : « Tout homme porte en lui une part de l’humaine condition« .

Conclusion

Dès le prologue, Montaigne donne le ton à son livre utilisant cette « forme naïve » qui est sans doute un charme des « Essais ». Par ailleurs, sa démarche autobiographique semble sincère et naturelle. N’a t-il pas en quelque sorte l’extraordinaire intelligence de nous parler d’un homme ordinaire même si cela n’exclut pas une part de naïveté? Nous sommes loin du regard de Rousseau sur lui-même et les « Essais » deviennent très vite beaucoup plus un appel à la réflexion plutôt qu’une introspection maladive.

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